MES ESSAIS

Luci claro 
(En plein jour)
Plaute, Aulularia


Le jour, apparaîtra plein de colombes blanches,
Plein d'étoiles, la nuit. 
Victor Hugo, Lux 




Comment prendre une photo?


Bien difficile question.

Ma démarche personnelle concernant l'argentique noir et blanc ne m'est toujours pas concluante. Je jette la majorité de mes épreuves papiers, n'étant pas satisfaite de leur rendu, mais je ne désespère pas.
J'ai commencé la photo à une époque où le numérique n'existait pas. Tout était argentique.
J'avais très envie de découvrir cet univers et les appareils réflex me faisaient rêver. J'allais pouvoir faire de la photo comme dans les magazines.
Mes premiers clichés, essentiellement des photos souvenirs,  ne restaient que des témoignages personnels. Rien de très artistique, je ne connaissais vraiment rien à la photo et là, j'ai creusé, j'ai commencé à m'inscrire à des activités labos pour du tirage en noir et blanc, j'ai écouté les conseils, compliqués.... je n'y comprenais rien...trop techniques...prodigués par des personnes sympathiques et de bonne volonté.  C'était bien pour démarrer, mais le sujet est trop vaste pour se résumer à quelques heures hebdomadaires, donc, il faut du temps, beaucoup de temps, de la patience, de la persévérance. Je ne tiens pas à vous décourager, je ne parle que de mon expérience, mais rien ne vaut la pratique, les erreurs, de bons livres, aller voir des expos, voir ce que font les plus grands et se dire que c'est possible (cela permet d'entretenir le rêve).
C'est en se heurtant aux difficultés que l'on apprend d'autant plus à apprécier le grand art dans la photographie. Donc au final, même si l'on ne devient pas « Le » photographe, le parcours effectué enrichi sa personne et permet d'avancer, de comprendre et de voir le monde avec une approche plus intéressante. Effectivement, cela m'apporte et devient une façon de vivre en complémentarité avec ce que je suis.

J'ai finalement découvert un moyen d'expression qui me convenait, plus que la simple image que j'imaginais à mes débuts.
J'ai progressé dans la technique, dans mon jugement, dans ma façon de vivre et de respirer le monde. Donc oui, la photographie, ça se travaille, il faut beaucoup, beaucoup d'heures, mais quand cela devient une passion, les heures ne comptent pas.
Ce blog représente aujourd'hui le résultat de beaucoup d'années de recherche, de trouvailles, ce ne sont pas des secrets, c'est juste une façon d'être, de se poser et surtout, de s'accepter et de continuer à vivre avec ce temps qui passe inexorablement.
C'est aussi une manière de se libérer des contraintes, des jugements, et maintenant, de partager.
Pas toujours facile de montrer ce que l'on fait, car c'est montrer une part de soi ; c'est aussi ce que j'ai découvert dans la photo. Mais bon, si mes photos peuvent faire écho à certains, pourquoi pas?









               Figé, infiniment figé

Les feuilles se sont brisées comme un éclat de rire,
Comme un amour se brise quand se fige un sourire ;
Et ces éclats de verre issus d’un grand miroir
Vont retomber en neige sur l’humus riche et noir.

Il neige sur le sol où les troncs s’enracinent.
Pourtant ce mouvement n’a point de direction :
S’il neige sur le sol, en faisant attention,
On voit qu’il neige aussi vers les branches plus fines.

C’est la magie d’un temps qui s’est soudain figé
Et qu’on peut remonter comme un film à l’envers :
A l’instant précédent la tempête est passée,
C’est le seul moment sûr de ce froid univers.

Nous ne saurons jamais ce qu’il en adviendra :
Pas d’autre réalité pour nous ne restera
Que ce plan éclaté et figé dans sa gloire,
Cet enchevêtrement fait de points blancs et noirs.

                          Jean-Marc Fairève
                                 7 avril 2018






Photos de présentation

Ces deux photos sont des scans  de tirages argentiques, peut-être les premières qui trouvent grâce à mes yeux, j'ai beaucoup de mal à faire des tirages argentiques, il faudrait que je puisse pratiquer d'avantage, mais mon temps passé dans la chambre noire est assez limité et surtout pas assez régulier. 
Elles me plaisent beaucoup. Que dire sur la prise de vue ? Il était pratiquement midi, un jour de fin d'automne par temps gris, le feuillage était jaune, en partie sur les arbres et beaucoup sur le sol. Eparpillé et bien dense. Il faisait un peu froid. J'ai installé le pied et un graflex (un appareil ancien à soufflet). 
La prise de vue avec est assez complexe. Il faut faire la visée sur un verre dépoli, l'image que l'on voit se former est à l'envers (haut bas et gauche droite ), de quoi vous faire perdre tous les repères. Ensuite, il faut enlever le dépoli sans bouger l'appareil, car sinon le cadrage est perdu, puis mettre à la place une cassette qui contient le film, prendre les mesures de la lumière avec une cellule, faire les réglages d' ouverture et de vitesse, retirer le cache, armer et appuyer avec un déclencheur, remettre le cache, retirer la cassette et enfin remettre le dépoli pour le prochain cadrage. Je n'ai pas noté les caractéristiques, vitesses ouverture, mais je pense que j'étais à f22 avec une vitesse assez lente pour une 400 asa.
Quant à l'optique, c'est celle d'un appareil à soufflet que j'ai bricolé pour l'installer sur le graflex avec une plaque en carton rigide que j'ai découpée aux dimensions.
Bien compliqué, tout ça pour un seul cliché. Mais le négatif est un 6x9, l'appareil est bricolé car assez ancien et pas toujours très fiable sur les vitesses de déclenchement. 
Toute cette technique casse un peu le charme de la photo, mais derrière les photos, il faut bien de la technique et de la discipline ; ce n'est pas sans peine, mais ça fait partie d'un rituel et ça permet de se concentrer et de se mettre en condition. 
Tout dans cet appareil est purement mécanique et assez rudimentaire au fond. Ensuite je n'entre pas dans le détail du développement du négatif ni du tirage sur papier en chambre noire. Tout cela pour dire que si la chaîne des actions a une défaillance dans sa réalisation, le processus ne peut pas se faire et il n'y a pas de photo.
La photographie (en général : argentique ou numérique ) est une activité difficile. Il ne s'agit pas simplement d'appuyer sur un bouton. Malgré toute notre expérience et notre préparation, on ne maîtrise pas tout, c'est une pratique de patience, d'indulgence et de modestie, on n'est jamais assuré du résultat. Je préfère en faire un hobby qu'un métier, et je n'aimerais pas faire une photo sur commande : quelle pression ! Je n'envie pas les photographes de profession. 
Si je fais de la photo, c'est d'abord et avant tout pour moi. Jean-Marc m'a juste convaincue de faire un blog, pour les faire partager, donc vous en verrez quelques-unes.






Expériences photographiques

Je collectionne un certain nombre d'appareils photos, car je trouve qu'ils représentent une époque et un savoir-faire aussi bien technologiques qu'artistiques ; le déclin de l'argentique a ouvert les portes de l'accessibilité financière de toutes ces merveilles. Maintenant, il est important de se renseigner correctement avant d'acheter et l'aléatoire est souvent de mise : donc prudence.
J'ai déjà testé quelques-uns de ces appareils sans vraiment laisser une analyse écrite qui puisse constituer une mémoire personnelle et une expérience moderne de leur utilisation, trop préoccupée par l'immédiateté de tout un contexte lié au travail effectué sur l'argentique en général, sujet bien vaste pour la néophyte que je suis.
En conséquence, même si je ne suis pas au point, je peux toujours faire part de mon expérience qui malgré tout n'est pas au degré zéro de l'argentique.
Je pense que la quête de la lumière est d'une grande complexité ; alors, il faut bien commencer quelque part.
Je cherche beaucoup de renseignements sur Internet sans trouver exactement les réponses à mes questions précises ; si ces résultats d'expériences peuvent servir à certain(e)s...



Première expérience écrite:

"Mon  Lubitel et moi" ( il s'agit du 166 Universel)

Ça y est, je me suis lancée la première expérience est donc le Lubitel.
C'est un appareil que j'avais acheté neuf, il y a longtemps (approximativement 30 ans) l'envie de faire du moyen format avec un appareil à bas prix, alors que je faisais du noir et blanc avec un AE 1 ( Canon) que j'avais acquis d'occasion à un adhérent d'un club photo qui me l'a finalement racheté quelques mois plus tard prétextant qu'un membre de sa famille y était très attaché et voulait le récupérer ; j'ai cédé et j'ai investi dans un Pentax, un Z1P.
Le moyen format (surtout carré) me faisait envie, les photos de Doisneau me faisaient rêver, mais là, j'avais conscience qu'il s'agissait d'un univers professionnel inaccessible, la photo n'étant pas mon métier mais un passe-temps. 
Je n'y connaissais pas grand-chose...et je suis allée acheter une pellicule 120 chez un photographe qui s'est bien fichu de moi car je ne connaissais même pas la dénomination de ces pellicules, faut dire, que je suis plus une intuitive et qu’une technique en matière de photographie, je pense l'être restée.

Bref, mon élan était coupé. Je ne sais même pas si j'ai réussi à faire la pellicule que j'ai trouvée à l'intérieur, il faudra bien que je la développe…
J'ai donc retiré cette pellicule et j'ai mis à la place une Fomatone 200. Me voilà partie en balade avec Jean-Marc, je sors pour faire mon premier cliché et là, premier échec : impossible de lire à travers de la pastille rouge l'emplacement du 1. Je tourne désespérément et je comprends que je n'y verrai rien car la pastille rouge est trop opaque, aucun repère de possible, je rentre.
Je me mets dans le noir pour rembobiner le négatif, je replace la bobine dans son compartiment et vérifie la pastille, je décide donc de faire le repérage avec un petite lampe à travers la pastille.
Deuxième sortie "mon Lubitel et moi". Cette fois-ci, armé de ma loupiote, je peux lire les numéros à travers la pastille rouge. Me voilà donc lancée dans la prise de vue, le temps est gris, il fait froid, mais je ne rentrerai pas bredouille. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai besoin de voir de l'eau quand je fais  des photos, je me mets sur un petit pont au-dessus de la rivière et je prends le cours d'eau dans sa perspective. Que dire ? La prise de vue n'est pas très aisée, car sur le dépoli l'image ne se dessine pas confortablement, une déformation importante gêne la visée, un cercle visuel d'observation semble se dérober dès qu'on bouge  l'appareil (problème de parallaxe). J'en tiens compte et fais ma série de photos, l'aspect plastique confère à l'appareil le côté pas sérieux du jouet qui est l'imitation d'un vrai, me voilà donc à jouer à prendre de photos. Le déclencheur est très souple et on se demande vraiment si on a appuyé, l'appareil est vraiment très léger.
Ne pas oublier d'avancer le film : gare à la superposition. Mes douze clichés sont dans la boîte, je n'ai pas compris, tout s'est passé très vite, l'effet plastique peut-être, la légèreté, le sentiment du « pour de faux », et surtout le sentiment de ne pas avoir d'appareil, mais juste un regard qui prend des clichés. Bon je rentrerai plus vite pour me mettre au chaud. Curieuse quand même de savoir ce qu'il y a dans la boîte.

Donc sans plus attendre, je développe le négatif en stand développement.
Eh bien, le résultat n'est pas si mal, malgré les imperfections que je vais expliquer plus loin.
Commençons par les points positifs.
L'appareil est très discret, très léger peu encombrant.
Le rendu est "rond", "doux" sans être" mou", le contraste est agréable et équilibré, élégant, aucun appareil que j'ai pu utiliser n'a ce rendu. Je suis très surprise, le rendu des verticales est correct et agréable peu de déformations (j'aime ça).
Les points négatifs.
Il ne supporte pas le soleil : mais pas du tout. J'ai voulu prendre un arbre en contre-jour, un léger rayon de soleil est sorti (j'ai donc voulu en profiter) et là, erreur fatale : une grande traînée noire traverse verticalement de part en part le négatif ! J'avais pris pourtant  la précaution de cacher la source de lumière derrière l'arbre. Bon, il me faudra en tenir compte à l’avenir.
Le négatif était tout rayé, je soupçonne le négatif d'être à l'origine de quelques rayures, mais pas de toutes, des rayures verticales qui transformaient mon rouleau de négatif en bobine de vieux film usé.
J'ai depuis menée mon enquête et découvert que les finitions n'étaient pas le top de ce genre d'appareil. Depuis j'ai gratté les aspérités gênantes avec la pointe d'un couteau (je bricole aussi, et je fais parfois des erreurs qui peuvent s’avérer irrémédiables, mais il n'y a que ceux qui ne font rien qui ne se trompent jamais).
Eh bien voilà une expérimentée globalement positive.
C'est un appareil que je conseille donc pour son aspect ludique. Il faut malgré tout se promener avec une cellule à main pour la mesure de la lumière et cela demande quand même une certaine expérience photographique, donc pas pour des débutants, ou sinon accompagnés.
Les photos ont été prises avec une pellicule 200 asa. Le temps était globalement gris, à f11 pour avoir un rendu optimal de l'optique donc à une vitesse de 1/15 (il vaut mieux ne pas trembler d'autant plus que le poids de l'objet n'aide pas à la stabilisation).
Bonnes photos !















A partir des photos du voyage lyonnais, je me suis décidée à ajouter ici le texte suivant, que j’avais écrit quelque temps auparavant. 


La rose et la photo.

La photographie est-elle la réalité?
Réponse: non.
Tout d'abord le monde qui nous entoure est  l'espace,  dans l'espace on est déjà en 3D et la photographie elle, elle est à plat, en 2D et elle est limitée dans un cadre.
Vous aurez beau avoir la plus belle photo d'une rose, vous n'aurez jamais son parfum.
"Ceci n'est pas une rose" même si la plupart des gens, quand ils voient la photo d'une rose, vous disent:
"Mais si,  tu vois bien, c'est une rose!" C'est toujours la même confusion entre le signifiant et le signifié. Donc désolée, mais l'on n'a que  "l'image" d'une rose.
Et c'est d'abord en cela que la photographie est intéressante, car tout ce que l'on voit sur une photographie n'existe pas, ce n'est que le reflet déformé de quelque chose qui a existé. Avez-vous croisé une rose toute plate ...? et la rose photographiée a-t-elle gardé la même "fraîcheur"?
Par contre la photographie a le pouvoir de réveiller en nous tout un imaginaire et, comme la madeleine de Proust, peut nous faire retrouver l'odeur de ladite rose.
L'art de la photographie est là: développer les imaginaires de ceux qui les regardent, éveiller des sensations.
Donc quand on prend une photo, il faut penser aux plans et au cadre et non aux espaces et aux hors-champ de ce qui est photographié, sachant que la photo, elle, va décontextualiser l'univers photographié pour créer le sien avec "ses volumes" et ses "hors-champ". Quand on fait une photo d'un paysage, on ne prend pas le paysage en photo, on fabrique un univers pour celui qui va l’observer.


Illustration avec quelques photos tirées de la sortie lyonnaise (cet article: http://luciesie.blogspot.fr/2017/07/travellyon.html):


Ceci n'est pas un café, mais la représentation d'un espace hyperréaliste d'un café en miniature. C'est donc la représentation d'une représentation. 



Voyageant par le regard et l'imagination à l'intérieur de cet espace doublement fictif, des évocations bien réelles ainsi que des souvenirs sont remontés à la surface grâce à l'ambiance et au décor ainsi créés et montrés. Cafés de mon enfance, guitare qui semble devoir être empoignée par Brassens lui-même, détail d'une photo qui m'interpelle justement parce que je possède la même en carte postale dans mes tiroirs, une photo argentique en noir et blanc... de Gérard Philipe. 





On peut le vérifier à partir de cette vue (qui malheureusement est un peu tronquée) qu’on trouve à ce lien : 
https://i.ytimg.com/vi/e68n1aX58n0/hqdefault.jpg





Prenons maintenant les deux photos suivantes. Il n'est pas sûr que vous ayez remarqué à première vue que la seconde était une vue prise ultérieurement en zoomant de l'angle en bas à gauche de la première. 





Pour mieux s'en rendre compte, utilisons un agrandissement de cette partie:




Mais quand je suis passée du format paysage au format portrait (afin d'accompagner les verticales), à la manière de Willy Ronis, j'ai patiemment attendu que l'espace vide du bas me propose autre chose que du "blanc". Et ça n'a pas manqué: un couple est venu opportunément provoquer l'effet graphique espéré. Et j'ajoute que j'adore le chapeau de la dame! 






Je trimbale souvent, très souvent mes appareils pour rien....
Je rentre avec mes sacs bredouille.
Et parfois quand l’inspiration m’a attrapée avec sa flèche de Cupidon, j’aime et je mitraille ( avec discernement bien entendu car en photo rien n’est simple) car ça s’éclaire.
Qu’est-ce qui m’inspire? : une lumière, une géométrie, une harmonie, une évidence (danse), des arabesques, du rococo, de la musique...du mystère. 
Et quand c’est posé là sur la pellicule ou le numérique, je me pose et j’essaye de comprendre car à la prise de vue, je n’ai pas tout vu mais c’est là... finalement ça me dépasse, et pourtant ça m’attire.
Est-ce que ce sont de bonnes photos? 
Je n’en sais rien, mais à moi elles me parlent.
Est-ce que je les aime (pour celles que je trouve réussies) ? 
En général oui, mais certaines pas du tout...
Est-ce qu’il faut les partager?
Je ne sais pas, on m’a dit qu’il fallait les montrer, souvent ça me gêne car c’est très personnel, je pense d’ailleurs que beaucoup d’entre vous sont aussi comme ça, et c’est souvent la raison pour laquelle vous ne supportez pas la critique ou le non-retour sur vos « exploits » , car c’est vous dans votre âme profonde qui vous sentez touché.
J’estime qu’il faut prendre du recul car après tout, il faut comprendre que ce n’est qu’un moyen d’expression, une écriture que chacun peut (ou pas) s’approprier et dont il fera une lecture en fonction de son histoire et de ses aspirations, et cela alors n’est plus de votre sphère intime et ne vous appartient plus.
21 février 2021












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